Proust, Marcel LETTRE AUTOGRAPHE SIGNÉE MARCEL PROUST À ILLAN DE CASA FUERTE. SAMEDI [JUIN 1904?]. 8 pages in-8 (181 x 115 mm), sur papier de deuil. Signé Marcel Proust Petites restaurations de scotch de 20 mm à la pliure d'une page. Lettre inédite, pleine de tendresse. A propos des envois de La Bible d’Amiens "En effet ayant voulu faire moi-même l’envoi de mon livre […] j’ai fait envoyer tous les exemplaires chez moi et depuis ce moment là je dévide et je coupe de la ficelle et développe du papier d’emballage et dresse des listes par quartier. […] D’abord vous m’avez écrit, la première fois quand vous m’avez envoyé le sublime souvenir de madame votre mère, et la copie de la phrase immuable et inimitable, une lettre non seulement la plus gentille que j’eusse avoir recue de vous, mais aussi la plus belle, vraiment admirable. Vous êtes de ceux que la gentillesse inspire, qu’elle élève, comme vous êtes aussi de ceux à qui elle sied physiquement. Toujours est-il que votre lettre était merveilleuse et la phrase sur l’impossible frôlement entre les chose trop opposées que vous m’envoyiez était vraiment superbe. Celle aussi sur le changement d’appartement. L’image douloureuse et pourtant apaisée ("Sois sage à ma douleur, et tiens toi plus tranquille") de madame votre mère est de toute beauté. […] A propos de ses lettres : "Mais vous y parlez de moi et de ma préface avec une gentillesse si excessive que je suis plus à l’aise pour vous louer, si vous même c’était quelqu’un d’autre que vous louiez. Je craignais au contraire beaucoup de choses entre vous et un moi assez peu assimilable. La façon dont vous l’avez "toléré" m’émerveille. Non qu’au fond je ne pense avoir raison. Je n’ai écrit que sous l’impérieuse dictée d’une vérité qui m’apparaissait. Mais je me rends si bien compte que les chemins qui m’ont conduit en face d’elle sont si différents de ceux que suivent les esprits de mes contemporains que je n’osais pas espérer qu’un si jeune homme pourrait même savoir de qui je parlais, aurait assez approfondi sa propre âme pour y trouver une réalité à confronter avec celle que j’essaye de peindre, et pour conclure en se, comparant, à quelque vérité […] Aussi j’ai voulu si fatigué que je fusse vous remercier de tout mon coeur. Je vous assure en effet que c’est de tout mon coeur que je le fais ici. Bien cher Illan et soyez heureux. Marcel Proust". La mère d’Illan de Casa Fuerte, italienne d’ascendance française, née Lefebvre de Clunières de Balsorano, égérie de D’annunzio et de Montesquiou (qui lui dédia Les Chauves-Souris), nièce de la princesse Eugénie, épousa Pierre Alvarez de Toledo, marquis de Casa-Fuerte. Proust rencontre Illan en 1899 au Grand-Guignol ; c’est Lucien Daudet, son "cher petit", qui le lui présente. Illan fréquente les milieux artistiques de son époque. Proust est impressionné par la beauté de ce jeune homme qui a dix ans de moins que lui, et est asthmatique comme lui, ce qui les rapproche. Au cours des années 1905-1906, Proust lui témoigne son affection au travers des lettres qu’il lui adresse et en 1913 lui offre Du côté de chez Swann "avec toute (s)a tendresse".
Proust, Marcel LETTRE AUTOGRAPHE SIGNÉE MARCEL PROUST À ILLAN DE CASA FUERTE. SAMEDI [JUIN 1904?]. 8 pages in-8 (181 x 115 mm), sur papier de deuil. Signé Marcel Proust Petites restaurations de scotch de 20 mm à la pliure d'une page. Lettre inédite, pleine de tendresse. A propos des envois de La Bible d’Amiens "En effet ayant voulu faire moi-même l’envoi de mon livre […] j’ai fait envoyer tous les exemplaires chez moi et depuis ce moment là je dévide et je coupe de la ficelle et développe du papier d’emballage et dresse des listes par quartier. […] D’abord vous m’avez écrit, la première fois quand vous m’avez envoyé le sublime souvenir de madame votre mère, et la copie de la phrase immuable et inimitable, une lettre non seulement la plus gentille que j’eusse avoir recue de vous, mais aussi la plus belle, vraiment admirable. Vous êtes de ceux que la gentillesse inspire, qu’elle élève, comme vous êtes aussi de ceux à qui elle sied physiquement. Toujours est-il que votre lettre était merveilleuse et la phrase sur l’impossible frôlement entre les chose trop opposées que vous m’envoyiez était vraiment superbe. Celle aussi sur le changement d’appartement. L’image douloureuse et pourtant apaisée ("Sois sage à ma douleur, et tiens toi plus tranquille") de madame votre mère est de toute beauté. […] A propos de ses lettres : "Mais vous y parlez de moi et de ma préface avec une gentillesse si excessive que je suis plus à l’aise pour vous louer, si vous même c’était quelqu’un d’autre que vous louiez. Je craignais au contraire beaucoup de choses entre vous et un moi assez peu assimilable. La façon dont vous l’avez "toléré" m’émerveille. Non qu’au fond je ne pense avoir raison. Je n’ai écrit que sous l’impérieuse dictée d’une vérité qui m’apparaissait. Mais je me rends si bien compte que les chemins qui m’ont conduit en face d’elle sont si différents de ceux que suivent les esprits de mes contemporains que je n’osais pas espérer qu’un si jeune homme pourrait même savoir de qui je parlais, aurait assez approfondi sa propre âme pour y trouver une réalité à confronter avec celle que j’essaye de peindre, et pour conclure en se, comparant, à quelque vérité […] Aussi j’ai voulu si fatigué que je fusse vous remercier de tout mon coeur. Je vous assure en effet que c’est de tout mon coeur que je le fais ici. Bien cher Illan et soyez heureux. Marcel Proust". La mère d’Illan de Casa Fuerte, italienne d’ascendance française, née Lefebvre de Clunières de Balsorano, égérie de D’annunzio et de Montesquiou (qui lui dédia Les Chauves-Souris), nièce de la princesse Eugénie, épousa Pierre Alvarez de Toledo, marquis de Casa-Fuerte. Proust rencontre Illan en 1899 au Grand-Guignol ; c’est Lucien Daudet, son "cher petit", qui le lui présente. Illan fréquente les milieux artistiques de son époque. Proust est impressionné par la beauté de ce jeune homme qui a dix ans de moins que lui, et est asthmatique comme lui, ce qui les rapproche. Au cours des années 1905-1906, Proust lui témoigne son affection au travers des lettres qu’il lui adresse et en 1913 lui offre Du côté de chez Swann "avec toute (s)a tendresse".
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