Proust, Marcel LETTRE AUTOGRAPHE SIGNÉE À SON PÈRE. 9 BOULEVARD MALESHERBES, JEUDI 10 HEURES [28 SEPTEMBRE 1893]. 4 p. in-16 (109 x 87 mm), sur un bi-feuillet. Encre noire. Signé "Ton fils Marcel". Papier légèrement jauni. Importante lettre sur le choix de carrière : à part la Littérature, tout pourrait être du "temps perdu". Une des 3 seules lettres connues de Proust à son père. De retour de Trouville où il a séjourné avec sa mère et après la licence de Droit, son père, qui ne conçoit pas que la Littérature puisse être un métier, le somme de choisir une carrière. Proust se soumet à son désir, tout en affirmant sa vocation littéraire en dehors de laquelle tout lui paraît "du temps perdu" : "Mon cher petit papa, J’espérais toujours finir par obtenir la continuation des études littéraires et philosophiques pour lesquelles je me crois fait. Mais puisque je vois que chaque année ne fait que m’apporter une discipline de plus en plus pratique, je préfère choisir tout de suite une des carrières pratiques que tu m’offrais." Soumis, presque résolu, il ajoute : "Je me mettrai à préparer sérieusement, à ton choix, le concours des affaires étrangères ou celui de l’École des Chartes. Quant à l’étude d’avoué, je préfèrerais mille fois entrer chez un agent de change", avant d’ajouter, cette fois presque menaçant : "D’ailleurs sois persuadé que je n’y resterais pas trois jours !". Revenant sur ce qui est sa vocation profonde, il continue : "Ce n’est pas que je croie toujours que toute autre chose que je ferai autre que les lettres et la philosophie, est pour moi du temps perdu. Mais entre plusieurs maux il y en a de meilleurs et de pires. Je n’en ai jamais conçu de plus atroce, dans mes jours les plus désespérés, que l’étude d’avoué." Citant Baudelaire (qui n’est pas exactement le modèle du bon fils studieux !), Proust poursuit : "Je suis charmé de me retrouver à la maison dont l’agrément me console de la Normandie et ne plus voir (comme dit Baudelaire en un vers dont tu éprouveras j’espère toute la force) : "Le soleil rayonnant sur la mer". Je t’embrasse mille fois de tout mon cœur. Ton fils, Marcel". Incisif, le style de cette lettre, tout à tour résolue, menaçante, triste et réjouie, tranche fortement avec celui des nombreuses lettres que Proust adresse à sa mère. La volonté de Proust s’y devine, comme se laissent entrevoir les âpres discussions qu’il dut avoir avec son père. À cette époque, Proust consacre déjà beaucoup de temps à l’écriture, notamment aux articles qu’il publie dans la Revue Blanche après en avoir donné beaucoup au Banquet. Dans la Recherche, le père du Narrateur, comme Adrien Proust dans la vie, dut se résoudre à accepter la vocation de son fils : "je vois bien que tu ne feras pas autre chose. On peut trouver cela une bonne carrière, moi ce n’est pas ce que j’aurais préféré pour toi, mais […] il ne faut pas que nous t’empêchions de suivre ta vocation" (Recherche, II, p. 447). Pour l’une des 3 autres lettres connues de Proust à son père, voir lot 174. Expositions : B.N.F., n° 115. -- Jacquemart-André, n° 65 -- L’Écriture et les Arts, n° 47. Références : Kolb, I, n° 102. [On joint] Nadar, Paul. Robert Proust. [20 novembre 1886]. Photographie originale. Tirage albuminé d'époque. Format carte de visite (81 x 60 mm). Petite déchirure. Timbre humide de la collection [Suzy] Mante-Proust au verso. Références : Nadar, repr. p. 33 (en entier) et p. 37.
Proust, Marcel LETTRE AUTOGRAPHE SIGNÉE À SON PÈRE. 9 BOULEVARD MALESHERBES, JEUDI 10 HEURES [28 SEPTEMBRE 1893]. 4 p. in-16 (109 x 87 mm), sur un bi-feuillet. Encre noire. Signé "Ton fils Marcel". Papier légèrement jauni. Importante lettre sur le choix de carrière : à part la Littérature, tout pourrait être du "temps perdu". Une des 3 seules lettres connues de Proust à son père. De retour de Trouville où il a séjourné avec sa mère et après la licence de Droit, son père, qui ne conçoit pas que la Littérature puisse être un métier, le somme de choisir une carrière. Proust se soumet à son désir, tout en affirmant sa vocation littéraire en dehors de laquelle tout lui paraît "du temps perdu" : "Mon cher petit papa, J’espérais toujours finir par obtenir la continuation des études littéraires et philosophiques pour lesquelles je me crois fait. Mais puisque je vois que chaque année ne fait que m’apporter une discipline de plus en plus pratique, je préfère choisir tout de suite une des carrières pratiques que tu m’offrais." Soumis, presque résolu, il ajoute : "Je me mettrai à préparer sérieusement, à ton choix, le concours des affaires étrangères ou celui de l’École des Chartes. Quant à l’étude d’avoué, je préfèrerais mille fois entrer chez un agent de change", avant d’ajouter, cette fois presque menaçant : "D’ailleurs sois persuadé que je n’y resterais pas trois jours !". Revenant sur ce qui est sa vocation profonde, il continue : "Ce n’est pas que je croie toujours que toute autre chose que je ferai autre que les lettres et la philosophie, est pour moi du temps perdu. Mais entre plusieurs maux il y en a de meilleurs et de pires. Je n’en ai jamais conçu de plus atroce, dans mes jours les plus désespérés, que l’étude d’avoué." Citant Baudelaire (qui n’est pas exactement le modèle du bon fils studieux !), Proust poursuit : "Je suis charmé de me retrouver à la maison dont l’agrément me console de la Normandie et ne plus voir (comme dit Baudelaire en un vers dont tu éprouveras j’espère toute la force) : "Le soleil rayonnant sur la mer". Je t’embrasse mille fois de tout mon cœur. Ton fils, Marcel". Incisif, le style de cette lettre, tout à tour résolue, menaçante, triste et réjouie, tranche fortement avec celui des nombreuses lettres que Proust adresse à sa mère. La volonté de Proust s’y devine, comme se laissent entrevoir les âpres discussions qu’il dut avoir avec son père. À cette époque, Proust consacre déjà beaucoup de temps à l’écriture, notamment aux articles qu’il publie dans la Revue Blanche après en avoir donné beaucoup au Banquet. Dans la Recherche, le père du Narrateur, comme Adrien Proust dans la vie, dut se résoudre à accepter la vocation de son fils : "je vois bien que tu ne feras pas autre chose. On peut trouver cela une bonne carrière, moi ce n’est pas ce que j’aurais préféré pour toi, mais […] il ne faut pas que nous t’empêchions de suivre ta vocation" (Recherche, II, p. 447). Pour l’une des 3 autres lettres connues de Proust à son père, voir lot 174. Expositions : B.N.F., n° 115. -- Jacquemart-André, n° 65 -- L’Écriture et les Arts, n° 47. Références : Kolb, I, n° 102. [On joint] Nadar, Paul. Robert Proust. [20 novembre 1886]. Photographie originale. Tirage albuminé d'époque. Format carte de visite (81 x 60 mm). Petite déchirure. Timbre humide de la collection [Suzy] Mante-Proust au verso. Références : Nadar, repr. p. 33 (en entier) et p. 37.
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