Manuscrit autographe signé intitulé « 29 juin 1832. Une visite à monsieur de Chateaubriand détenu à la Préfecture de police ». 9 pp. in-4 sur bi-feuillets cousus, dos renforcé. CHATEAUBRIAND EMPRISONNÉ POUR SON SOUTIEN À LA DUCHESSE DE BERRY. UN TÉMOIGNAGE DIRECT SUR CETTE PÉRIPÉTIE DE LA TENTATIVE DE SOULÈVEMENT LÉGITIMISTE : dès l'avènement de Louis-Philippe, Chateaubriand proclama son attachement à Charles X et à son petit-fils le duc de Bordeaux (enfant du duc de Berry mort en 1820 et de Marie-Caroline). Il démissionna de toutes ses fonctions mais, paladin d'une cause qu'il savait perdue, il resta en relations avec la duchesse de Berry et ne renonça pas à s'exprimer, se plaçant parmi les premiers opposants au régime orléaniste. Aussi, quand Marie-Caroline tenta son aventure en Provence puis en Vendée (avril-novembre 1832) Chateaubriand fut immédiatement suspect aux yeux du pouvoir qui le fit arrêter le 16 juin 1832 pour complot contre la sûreté de l'État : très fréquenté dans sa prison - sa femme, madame Récamier, Ampère, Béranger ou Fanny Dénoix furent de ses visiteurs - il tira un parti glorieux de cet épisode, ridiculisa son juge et fut libéré sur un non lieu le 30 juin suivant. Et Chateaubriand n'en rabattit pas : la duchesse de Berry ayant finalement été capturée en novembre 1832, il fit paraître en 1833 son célèbre Mémoire sur la captivité de Mme la duchesse de Berry, dans lequel il affirme encore : « Madame [...] : votre fils est mon roi ! ». Ce texte est remarquable à plusieurs égards, et notamment en ce qu'il nous donne un témoignage littéraire direct de l'influence, pour ne pas dire du rayonnement quasi mythologique, de l'auteur d'Atala sur son temps. Les phrases de ce texte sont sous l'emprise manifeste de la prose de Chateaubriand, elles en sont imprégnées, et il est d'autant plus troublant de voir cette emprise se nouer justement dans l'évocation même du maître, réduit à l'état de captif. « 29 juin ! Souvenir immortel, empreint d'un prestige enivrant, toujours tu reviens du passé comme une vive étincelle surgit encore d'un vaste foyer éteint... Je venais d'apprendre la captivité de M. de Chateaubriand, de celui devant qui la France entière doit fléchir les genoux... aujourd'hui poursuivi, outragé, persécuté parce qu'il était grand, parce qu'il était juste. AGITÉE D'ÉTONNEMENT ET D'INDIGNATION JE VOLE À PARIS, franchis le seuil de la Préfecture de Police et parviens auprès de Mr Gisquet à qui je demande la faveur de visiter l'illustre captif. C'est impossible me répond-il, monsieur de Chateaubriand est au secret, personne ne peut pénétrer jusqu'à lui... AINSI CÉLUTA, CHERCHANT RENÉ PRISONNIER À LA NOUVELLE ORLÉANS, accablée par l'orage, s'égarait dans des rues sombres et tortueuses, sans secours, sans que sa plainte fût comprise ! Deux heures s'étaient écoulées, j'avais parcouru d'immenses salles, monté plusieurs escaliers, frappé à vingt portes sans aucun résultat... Enfin... le secrétaire paraît... "Mme Dénoix peut communiquer avec monsieur de Chateaubriand". Oh ! j'avais des ailes ! Je franchis les escaliers, les salles, les corridors avec la rapidité d'un oiseau, menacée de la flèche d'un chasseur. Me voici à l'hôtel de Mr Gisquet, devant lui ; radieuse, triomphante lui montrant le passeport... BIENTÔT UNE PORTE S'OUVRE... UN VIEILLARD !... UN GÉNIE !... UN DIEU !... S'OFFRE À MOI... C'ÉTAIT LUI !... C'ÉTAIT LE CHANTRE D'ATALA ! Mes yeux se couvrent d'un nuage, ma langue se glace, mon coeur bat à me rompre la poitrine, mon sang reflue vers mon front et embrase mon visage ; je tombe comme anéantie sur un fauteuil que m'approche l'homme sublime, bégayant des excuses, l'incohérente expression du tribut d'hommages que je lui apportais... L'illustre auteur m'adresse des sons dont l'irrésistible charme me ranime, me calme. Mes yeux égarés se fixent sur lui. Dieu ! quel imposant aspect ! Me voici donc, répétai-je, en présence du génie qui a rempli la terre de son nom ! Dont les divines pages m'ont tant de fois ému
Manuscrit autographe signé intitulé « 29 juin 1832. Une visite à monsieur de Chateaubriand détenu à la Préfecture de police ». 9 pp. in-4 sur bi-feuillets cousus, dos renforcé. CHATEAUBRIAND EMPRISONNÉ POUR SON SOUTIEN À LA DUCHESSE DE BERRY. UN TÉMOIGNAGE DIRECT SUR CETTE PÉRIPÉTIE DE LA TENTATIVE DE SOULÈVEMENT LÉGITIMISTE : dès l'avènement de Louis-Philippe, Chateaubriand proclama son attachement à Charles X et à son petit-fils le duc de Bordeaux (enfant du duc de Berry mort en 1820 et de Marie-Caroline). Il démissionna de toutes ses fonctions mais, paladin d'une cause qu'il savait perdue, il resta en relations avec la duchesse de Berry et ne renonça pas à s'exprimer, se plaçant parmi les premiers opposants au régime orléaniste. Aussi, quand Marie-Caroline tenta son aventure en Provence puis en Vendée (avril-novembre 1832) Chateaubriand fut immédiatement suspect aux yeux du pouvoir qui le fit arrêter le 16 juin 1832 pour complot contre la sûreté de l'État : très fréquenté dans sa prison - sa femme, madame Récamier, Ampère, Béranger ou Fanny Dénoix furent de ses visiteurs - il tira un parti glorieux de cet épisode, ridiculisa son juge et fut libéré sur un non lieu le 30 juin suivant. Et Chateaubriand n'en rabattit pas : la duchesse de Berry ayant finalement été capturée en novembre 1832, il fit paraître en 1833 son célèbre Mémoire sur la captivité de Mme la duchesse de Berry, dans lequel il affirme encore : « Madame [...] : votre fils est mon roi ! ». Ce texte est remarquable à plusieurs égards, et notamment en ce qu'il nous donne un témoignage littéraire direct de l'influence, pour ne pas dire du rayonnement quasi mythologique, de l'auteur d'Atala sur son temps. Les phrases de ce texte sont sous l'emprise manifeste de la prose de Chateaubriand, elles en sont imprégnées, et il est d'autant plus troublant de voir cette emprise se nouer justement dans l'évocation même du maître, réduit à l'état de captif. « 29 juin ! Souvenir immortel, empreint d'un prestige enivrant, toujours tu reviens du passé comme une vive étincelle surgit encore d'un vaste foyer éteint... Je venais d'apprendre la captivité de M. de Chateaubriand, de celui devant qui la France entière doit fléchir les genoux... aujourd'hui poursuivi, outragé, persécuté parce qu'il était grand, parce qu'il était juste. AGITÉE D'ÉTONNEMENT ET D'INDIGNATION JE VOLE À PARIS, franchis le seuil de la Préfecture de Police et parviens auprès de Mr Gisquet à qui je demande la faveur de visiter l'illustre captif. C'est impossible me répond-il, monsieur de Chateaubriand est au secret, personne ne peut pénétrer jusqu'à lui... AINSI CÉLUTA, CHERCHANT RENÉ PRISONNIER À LA NOUVELLE ORLÉANS, accablée par l'orage, s'égarait dans des rues sombres et tortueuses, sans secours, sans que sa plainte fût comprise ! Deux heures s'étaient écoulées, j'avais parcouru d'immenses salles, monté plusieurs escaliers, frappé à vingt portes sans aucun résultat... Enfin... le secrétaire paraît... "Mme Dénoix peut communiquer avec monsieur de Chateaubriand". Oh ! j'avais des ailes ! Je franchis les escaliers, les salles, les corridors avec la rapidité d'un oiseau, menacée de la flèche d'un chasseur. Me voici à l'hôtel de Mr Gisquet, devant lui ; radieuse, triomphante lui montrant le passeport... BIENTÔT UNE PORTE S'OUVRE... UN VIEILLARD !... UN GÉNIE !... UN DIEU !... S'OFFRE À MOI... C'ÉTAIT LUI !... C'ÉTAIT LE CHANTRE D'ATALA ! Mes yeux se couvrent d'un nuage, ma langue se glace, mon coeur bat à me rompre la poitrine, mon sang reflue vers mon front et embrase mon visage ; je tombe comme anéantie sur un fauteuil que m'approche l'homme sublime, bégayant des excuses, l'incohérente expression du tribut d'hommages que je lui apportais... L'illustre auteur m'adresse des sons dont l'irrésistible charme me ranime, me calme. Mes yeux égarés se fixent sur lui. Dieu ! quel imposant aspect ! Me voici donc, répétai-je, en présence du génie qui a rempli la terre de son nom ! Dont les divines pages m'ont tant de fois ému
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