Stendhal, Henri Beyle ditHistoire de la peinture en Italie.Paris, P. Didot l’aîné, 1817. 2 volumes in-8 (201 x128 mm). Demi-basane blonde à coins, dos lisse orné de filets dorés et fleuron doré répété, pièces de titre et de tomaison de basane brune, tranches jaspées (Reliure strictement de l'époque). Boîte demi-maroquin aubergine à grain long à coins, dos à fines bandes mosaïquées et décoré à la grotesque, filets et palettes dorés (Dubois d’Enghien-Dooms). Exemplaire annoté par Stendhal.
Exceptionnel exemplaire de Louis de Potter, avec un long envoi amical. Édition originale, seconde émission.
D'une grande rareté : un des quelques volumes publiés par Stendhal qui donne son véritable nom, "M. Beyle, ex-auditeur au Conseil d’Etat", sur le titre de relais, au lieu de la mention "M.B.A.A." et avant la seconde édition (1831) qui donnera le pseudonyme de "Stendhal".
L'exemplaire présente les caractéristiques suivantes :- les 3 feuillets d’errata (2 ff. n. ch. au t. I et 1 f.n.ch. au t. II), reliés en tête après les titres, tels que signalés par H. Cordier, mais non par Vicaire (voir infra l’exemplaire Stendhal de Grenoble).- Le titre du tome I porte l’épigraphe modifiée des 6 vers du Monti de Manfredi à la place de la citation sur les Carrache de la 1re émission.- Le titre du tome II porte pour la première fois l’épigraphe que les Stendhaliens connaissent bien : "To the happy few" ("Cela explique tout le titre. Je le dédie aux âmes sensibles", dit-il dans une lettre à Crozet de 1816), devise qui figure également en note (t. I, p. 148) et à la fin des Promenades dans Rome, du Rouge et le Noir et de La Chartreuse de Parme. C’est seulement lors de la remise en vente de 1825 que le tome II présentera également les vers du Monti.
Ce sont les seuls volumes publiés du vivant de Stendhal à porter le nom de "Beyle", ce qui relevait à l'époque d'une certaine audace. P. Arbelet ajoute qu’ils ont été réalisés à la demande expresse de Stendhal, formulée dès 1819 au baron de Mareste et répétée en 1820 après les échos dont l’ouvrage bénéficia ; demande remarquable lorsqu’on sait que Stendhal chargeait son ami Crozet d’être un intermédiaire auprès des imprimeurs et qu’il ne voulut pas même dans un premier temps que Didot connaisse son nom. En effet, les thèses tendancieuses de l’auteur l’obligaient à cacher son nom sous l’abréviation M.B.A.A. dans la plupart des exemplaires, et à l’éditeur d’imposer 26 cartons. Pour mystifier davantage encore les notabilités françaises auxquelles il envoyait l’ouvrage, il lui arriva de signer Aubertin fils (pour "M.B.A.Aubertin"). Plusieurs passages dangereux pouvaient être signalés, en France à la police de la Restauration, en Italie au sévère gouvernement autrichien. "Ces craintes n’étaient pas vaines", explique H. Martineau, "et quand en 1828 Stendhal sera expulsé de Milan, ce sera en grande partie pour avoir écrit cet ouvrage, qui plus tard l’empêchera encore d’être accrédité comme consul à Trieste.[…] Sa seule précaution, en réalité, fut de ne pas signer ce livre" (L’Œuvre de Stendhal, p. 121). Magnifique et long envoi autographe à l’historien et révolutionnaire belge Louis de Potter, à l’encre brune sur le faux-titre du premier tome :"Hommage à l’auteur de l’Espritde l’Eglise,accompagné de l’instante prièrede remarquer et corriger les fautes.L’auteur n’a pu pénétrer dans aucuneBibliothèque à Rome, et n’a rien susur les mœurs du siècle de Léon Xque par Reichard et les écrivainsflorentins".
L'envoi n'est pas signé, pour les raisons énoncées plus haut. Les 8 volumes de L’Esprit de l’Eglise ou Considérations philosophiques de Louis de Potter avaient paru chez Babeuf en 1821, et à l’automne 1823, Stendhal qui se rendait à Florence, sollicita leur auteur pour être introduit dans la meilleure société de la ville où Potter, après dix ans passés à Rome, avait séjourné entre 1821 et 1823 pour effectuer des recherches sur la famille Ricci. Sa Vie de Scipion de Ricci sur la dépravation des couvents au XVIIIe siècle, publiée à Bruxelles en 1825 et censurée en France, réjouira Stendhal qui en admirera le sérieux et la "véracité" de l’historien, sans toutefois en apprécier le style.Par son envoi, Stendhal s’en remet à son correspondant, avouant des connaissances limitées quant au premier quart du XVIe siècle et se référant au Guide du voyageur en Europe du journaliste allemand Heinrich A. Ottokar Reichard, un des premiers guides de voyage, traduit en français dès 1793. C’est très probablement avant le départ de Stendhal pour Florence que de Potter aura reçu cet exemplaire annoté, puisque le 28 octobre, il écrit à Giovan Pietro Vieusseux, fondateur et directeur de la revue Antologia pour recommander Stendhal : "Je vous ai envoyé, il n’y a pas longtemps, l’intéressante Histoire de la peinture de M. Beyle ; c’est M. Beyle lui-même que j’ai l’avantage de vous faire connaître maintenant" (cité par Charlier, p. 59). Avec des annotations autographes en marge de 14 pages, à l’encre brune. 4 d’entre elles figurent sur les feuillets repliés, non rognées par le couteau du relieur (contrairement à l’exemplaire de Grenoble dont quelques annotations sont coupées).Plusieurs de ces annotations sont à lire en ayant à l’esprit une secrète connivence italienne, anticléricale et libérale entre Stendhal et Louis de Potter, et certaines d’entre elles indiquent des arrangements ou des suppressions par "prudence" de l’éditeur. Tome I - p. [I] : "ôter une note sur les Suisses, ils n’ont pas livré M. Thibaudeau au [?] seulement inhumainement chassé et [?]". Référence à une note de bas de page concernant la citation de Machiavel évoquant la loyauté des Suisses à propos de Côme de Médicis (p. LIII). Stendhal prend ainsi la défense d’Antoine Claire Thibaudeau (1765-1854), ancien conventionnel et pair de France, qui avait fui en Suisse après la chute de Napoléon. Arrêté par l’archiduc Jean d’Autriche, interné puis banni du territoire français comme régicide, il était alors installé à Prague.- p. XVII : "Une prosopopée où il est question de L. XIV et d’Alexandre II, châtrée par l’éditeur ".- p. L : note de bas de page biffée, où les initiales R. et C. sont complétées par les noms de "Rioust" et "Chevalier", "deux condamnés injustement / pr. délits de la presse vers 1817 " Ces deux lettres, longtemps mystérieuses, furent attribuées par P. Arbelet à ces deux journalistes poursuivis pour leurs écrits.- p. LXXXII : le nom complet de la ville de Besançon est ajouté à la note de bas de page, "Ecrit en septembre 1814, à B****".- p. 210 : commentaires sur des œuvres d’art vues à Milan, comme la copie de la Cène de Léonard de Vinci par Giuseppe Bossi : "Très mauvaise copie / par Bossi qui fut un beau garçon / et rien de plus / Buste / sublime du / dit par Canova à Ambrosiana".- p. 212 : ajouts dans la note de bas de page du même chapitre LIII concernant d'autres copies de ladite Cène, l'une par Giacomo Raffaelli "portée à Vienne" et une conservée à la Chartreuse de Pavie pour laquelle Stendhal aurait tenté une transaction avec des marchands "de Londres". Tome II- p. 104 : la note dans laquelle il est fait l’éloge du despotisme éclairé des empereurs de Russie, Catherine et Alexandre, en s’appuyant sur une citation de Voltaire, est biffée et suivie de la mention "prudence".- p. 105 : en regard de la note concernant le tempérament "bilieux" de l’empereur Napoléon, nommé ici seulement par une périphrase, Stendhal ajoute "arrangé par l’éditeur".- p. 120 : à propos de l’enlèvement d’œuvres d’art de l’Italie vers la France : "car c’est la lâcheté de ses chefs qui les a laissé reprendre. Il fallait à la première nouvelle mettre le musée au pillage. On aurait ainsi des particuliers [2 mots non déchiffrés] reprendre les tableaux".- p. 126 : le texte de la note de bas de page, citant un article contre Napoléon paru dans les Débats du 5 juin 1817, est biffé d’un trait avec le même commentaire que précédemment : "par prudence".- p. 210 : noms propres complétés dans la note de bas de page : "La ville de L s / Langres par l’organe du grand poète comique R /oger ". Allusion à la carrière politique de Jean-François-Roger (1776-1842), natif de Langres, un temps député de la Haute-Marne [Langres] et auteur de pièces comiques et lyriques.- p. 250 : note relative à la religion entièrement biffée d’un trait de plume, toujours par "prudence de l’éditeur ".- p. 352 : idem, par "Prudence de l’éditeur".- p. 392 : en marge de la première note du chapitre sur l’histoire de la basilique Saint-Pierre de Rome : "l’auteur a trouvé toutes les sources d’information fermées pour lui à Rome on lui a saisi Montesquieu à la douane voilà tout. Il n’avait garde de réclamer la protection du savant et libéral duc de Blacas". Stendhal séjourna à Rome de décembre 1816 à janvier 1817, à l’époque où Casimir de Blacas d’Aulps était ambassadeur de France auprès du Saint-Siège, à Rome. Un des 9 exemplaires annotés. Stendhal ayant pris l’habitude d’annoter, voire d’interfolier, les livres de sa bibliothèque dès les années 1810, on connaît huit autres exemplaires annotés de l’Histoire de la peinture en Italie :- [a] Exemplaire Tourneux, tome I seul connu avant cartons (étudié par P. Arbelet, 1924).- [b] Paris, Bibliothèque Doucet. Exemplaire Blanchard de Farges (id.)- [c] Milano, Biblioteca Braidense. Exemplaire Novati, annoté par l’auteur et par des amis italiens.- [d] Grenoble, Bibliothèque municipale. Exemplaire de Stendhal-Alessandro Carabelli (étudié par H. Martineau in Mercure de France, 1er décembre 1950 ; en reliure d’époque).- [e] Roma, Biblioteca dell’ Instituto di archeologia e storia dell’arte, fonds Rocco Pagliaro (envoi et une annotation).- [f] Torino, Biblioteca dell’Accademia delle Scienze (envoi et une annotation).- [g] Exemplaire Achille Pellizzari, collectionneur stendhalien de l'entre-deux-guerres (vente, mars 1950). Redécouvert et acheté par le stendhalien Dr Bruno Pincherle qui en publie les annotations bien calligraphiées dans le Stendhal Club (n° 3, 15 avril 1959). Le cryptogramme d’auteur du titre est ici complété par M.B.A. Aubertin. Quelques années plus tard, Pincherle signale en passant 3 autres exemplaires d’après une information du grand stendhalien François Michel : "Di tre altre copie ─ non illustrate ancora ─ mi dà notizia François Michel : una di queste appartenne allo storico belga Louis de Potter, grande amico dell’autore [nous soulignons]" (In Compagnia di Stendhal. Milano, Pesce d’oro, 1967, p. 29).- [h] Exemplaire Jacques Guérin, puis Jaime Ortiz Patiño (Sotheby’s, II, 2 décembre 1998, n° 67 ; 14 ff. de garde annotés à l’encre et sur les marges, au crayon ; notes postérieures à la reliure. Certaines ont été publiées par H. Martineau dans Le Calendrier de Stendhal en 1950, pp. 213 et suivantes). Les exemplaires portant le nom complet de Beyle sont rarissimes ; outre celui-ci, on en dénombre six : exemplaire Mérimée (décrit par Vicaire d’après la vente de 1891 et repris par H. Cordier) ; exemplaire Stritch-Jules Guillemin (première mention en 1875) ; exemplaire Georges Heilbrun (relié par Maylander avec les deux titres et le f. de dédicace à l’empereur de Russie) ; exemplaire du comte Kosakowsky (avec envoi ; Sothebys 19 juin 2014, n° 41) et deux exemplaires de la bibliothèque de Stendhal : celui, également annoté, de Jacques Guérin puis de la Bibliothèque Jaime Ortiz Patino, et celui du Colonel Sikles (I, 20-21 avril 1989, n° 196) ayant figuré dans le catalogue Blaizot n° 314 de février 1960 (référence de la main de Simonson au crayon sur la garde du tome I de notre exemplaire). Parmi ces exemplaires, seuls 3 portent des envois (celui de Mérimée, celui du comte Kosakowsky et le présent exemplaire).
Cette Histoire de la peinture en Italie est la première œuvre vraiment originale qu’ait publiée Stendhal, si l’on considère que les Lettres écrites de Vienne en Autriche sur le célèbre compositeur J.H. Haydn (1814, connues sous le titre de Vies de Haydn, Mozart et Métastase qui leur sera donné en 1817) sont davantage des traductions que des compositions (Paupe, p. 18). Nous remercions Hélène de Jacquelot et Jean-Jacques Labia pour leurs précieuses indications concernant les annotations autographes, ainsi que Pascal de Sadeleer, qui présenta cet exemplaire dans nos salles en 2013, et enfin Jacques Houbert.
Stendhal, Henri Beyle ditHistoire de la peinture en Italie.Paris, P. Didot l’aîné, 1817. 2 volumes in-8 (201 x128 mm). Demi-basane blonde à coins, dos lisse orné de filets dorés et fleuron doré répété, pièces de titre et de tomaison de basane brune, tranches jaspées (Reliure strictement de l'époque). Boîte demi-maroquin aubergine à grain long à coins, dos à fines bandes mosaïquées et décoré à la grotesque, filets et palettes dorés (Dubois d’Enghien-Dooms). Exemplaire annoté par Stendhal.
Exceptionnel exemplaire de Louis de Potter, avec un long envoi amical. Édition originale, seconde émission.
D'une grande rareté : un des quelques volumes publiés par Stendhal qui donne son véritable nom, "M. Beyle, ex-auditeur au Conseil d’Etat", sur le titre de relais, au lieu de la mention "M.B.A.A." et avant la seconde édition (1831) qui donnera le pseudonyme de "Stendhal".
L'exemplaire présente les caractéristiques suivantes :- les 3 feuillets d’errata (2 ff. n. ch. au t. I et 1 f.n.ch. au t. II), reliés en tête après les titres, tels que signalés par H. Cordier, mais non par Vicaire (voir infra l’exemplaire Stendhal de Grenoble).- Le titre du tome I porte l’épigraphe modifiée des 6 vers du Monti de Manfredi à la place de la citation sur les Carrache de la 1re émission.- Le titre du tome II porte pour la première fois l’épigraphe que les Stendhaliens connaissent bien : "To the happy few" ("Cela explique tout le titre. Je le dédie aux âmes sensibles", dit-il dans une lettre à Crozet de 1816), devise qui figure également en note (t. I, p. 148) et à la fin des Promenades dans Rome, du Rouge et le Noir et de La Chartreuse de Parme. C’est seulement lors de la remise en vente de 1825 que le tome II présentera également les vers du Monti.
Ce sont les seuls volumes publiés du vivant de Stendhal à porter le nom de "Beyle", ce qui relevait à l'époque d'une certaine audace. P. Arbelet ajoute qu’ils ont été réalisés à la demande expresse de Stendhal, formulée dès 1819 au baron de Mareste et répétée en 1820 après les échos dont l’ouvrage bénéficia ; demande remarquable lorsqu’on sait que Stendhal chargeait son ami Crozet d’être un intermédiaire auprès des imprimeurs et qu’il ne voulut pas même dans un premier temps que Didot connaisse son nom. En effet, les thèses tendancieuses de l’auteur l’obligaient à cacher son nom sous l’abréviation M.B.A.A. dans la plupart des exemplaires, et à l’éditeur d’imposer 26 cartons. Pour mystifier davantage encore les notabilités françaises auxquelles il envoyait l’ouvrage, il lui arriva de signer Aubertin fils (pour "M.B.A.Aubertin"). Plusieurs passages dangereux pouvaient être signalés, en France à la police de la Restauration, en Italie au sévère gouvernement autrichien. "Ces craintes n’étaient pas vaines", explique H. Martineau, "et quand en 1828 Stendhal sera expulsé de Milan, ce sera en grande partie pour avoir écrit cet ouvrage, qui plus tard l’empêchera encore d’être accrédité comme consul à Trieste.[…] Sa seule précaution, en réalité, fut de ne pas signer ce livre" (L’Œuvre de Stendhal, p. 121). Magnifique et long envoi autographe à l’historien et révolutionnaire belge Louis de Potter, à l’encre brune sur le faux-titre du premier tome :"Hommage à l’auteur de l’Espritde l’Eglise,accompagné de l’instante prièrede remarquer et corriger les fautes.L’auteur n’a pu pénétrer dans aucuneBibliothèque à Rome, et n’a rien susur les mœurs du siècle de Léon Xque par Reichard et les écrivainsflorentins".
L'envoi n'est pas signé, pour les raisons énoncées plus haut. Les 8 volumes de L’Esprit de l’Eglise ou Considérations philosophiques de Louis de Potter avaient paru chez Babeuf en 1821, et à l’automne 1823, Stendhal qui se rendait à Florence, sollicita leur auteur pour être introduit dans la meilleure société de la ville où Potter, après dix ans passés à Rome, avait séjourné entre 1821 et 1823 pour effectuer des recherches sur la famille Ricci. Sa Vie de Scipion de Ricci sur la dépravation des couvents au XVIIIe siècle, publiée à Bruxelles en 1825 et censurée en France, réjouira Stendhal qui en admirera le sérieux et la "véracité" de l’historien, sans toutefois en apprécier le style.Par son envoi, Stendhal s’en remet à son correspondant, avouant des connaissances limitées quant au premier quart du XVIe siècle et se référant au Guide du voyageur en Europe du journaliste allemand Heinrich A. Ottokar Reichard, un des premiers guides de voyage, traduit en français dès 1793. C’est très probablement avant le départ de Stendhal pour Florence que de Potter aura reçu cet exemplaire annoté, puisque le 28 octobre, il écrit à Giovan Pietro Vieusseux, fondateur et directeur de la revue Antologia pour recommander Stendhal : "Je vous ai envoyé, il n’y a pas longtemps, l’intéressante Histoire de la peinture de M. Beyle ; c’est M. Beyle lui-même que j’ai l’avantage de vous faire connaître maintenant" (cité par Charlier, p. 59). Avec des annotations autographes en marge de 14 pages, à l’encre brune. 4 d’entre elles figurent sur les feuillets repliés, non rognées par le couteau du relieur (contrairement à l’exemplaire de Grenoble dont quelques annotations sont coupées).Plusieurs de ces annotations sont à lire en ayant à l’esprit une secrète connivence italienne, anticléricale et libérale entre Stendhal et Louis de Potter, et certaines d’entre elles indiquent des arrangements ou des suppressions par "prudence" de l’éditeur. Tome I - p. [I] : "ôter une note sur les Suisses, ils n’ont pas livré M. Thibaudeau au [?] seulement inhumainement chassé et [?]". Référence à une note de bas de page concernant la citation de Machiavel évoquant la loyauté des Suisses à propos de Côme de Médicis (p. LIII). Stendhal prend ainsi la défense d’Antoine Claire Thibaudeau (1765-1854), ancien conventionnel et pair de France, qui avait fui en Suisse après la chute de Napoléon. Arrêté par l’archiduc Jean d’Autriche, interné puis banni du territoire français comme régicide, il était alors installé à Prague.- p. XVII : "Une prosopopée où il est question de L. XIV et d’Alexandre II, châtrée par l’éditeur ".- p. L : note de bas de page biffée, où les initiales R. et C. sont complétées par les noms de "Rioust" et "Chevalier", "deux condamnés injustement / pr. délits de la presse vers 1817 " Ces deux lettres, longtemps mystérieuses, furent attribuées par P. Arbelet à ces deux journalistes poursuivis pour leurs écrits.- p. LXXXII : le nom complet de la ville de Besançon est ajouté à la note de bas de page, "Ecrit en septembre 1814, à B****".- p. 210 : commentaires sur des œuvres d’art vues à Milan, comme la copie de la Cène de Léonard de Vinci par Giuseppe Bossi : "Très mauvaise copie / par Bossi qui fut un beau garçon / et rien de plus / Buste / sublime du / dit par Canova à Ambrosiana".- p. 212 : ajouts dans la note de bas de page du même chapitre LIII concernant d'autres copies de ladite Cène, l'une par Giacomo Raffaelli "portée à Vienne" et une conservée à la Chartreuse de Pavie pour laquelle Stendhal aurait tenté une transaction avec des marchands "de Londres". Tome II- p. 104 : la note dans laquelle il est fait l’éloge du despotisme éclairé des empereurs de Russie, Catherine et Alexandre, en s’appuyant sur une citation de Voltaire, est biffée et suivie de la mention "prudence".- p. 105 : en regard de la note concernant le tempérament "bilieux" de l’empereur Napoléon, nommé ici seulement par une périphrase, Stendhal ajoute "arrangé par l’éditeur".- p. 120 : à propos de l’enlèvement d’œuvres d’art de l’Italie vers la France : "car c’est la lâcheté de ses chefs qui les a laissé reprendre. Il fallait à la première nouvelle mettre le musée au pillage. On aurait ainsi des particuliers [2 mots non déchiffrés] reprendre les tableaux".- p. 126 : le texte de la note de bas de page, citant un article contre Napoléon paru dans les Débats du 5 juin 1817, est biffé d’un trait avec le même commentaire que précédemment : "par prudence".- p. 210 : noms propres complétés dans la note de bas de page : "La ville de L s / Langres par l’organe du grand poète comique R /oger ". Allusion à la carrière politique de Jean-François-Roger (1776-1842), natif de Langres, un temps député de la Haute-Marne [Langres] et auteur de pièces comiques et lyriques.- p. 250 : note relative à la religion entièrement biffée d’un trait de plume, toujours par "prudence de l’éditeur ".- p. 352 : idem, par "Prudence de l’éditeur".- p. 392 : en marge de la première note du chapitre sur l’histoire de la basilique Saint-Pierre de Rome : "l’auteur a trouvé toutes les sources d’information fermées pour lui à Rome on lui a saisi Montesquieu à la douane voilà tout. Il n’avait garde de réclamer la protection du savant et libéral duc de Blacas". Stendhal séjourna à Rome de décembre 1816 à janvier 1817, à l’époque où Casimir de Blacas d’Aulps était ambassadeur de France auprès du Saint-Siège, à Rome. Un des 9 exemplaires annotés. Stendhal ayant pris l’habitude d’annoter, voire d’interfolier, les livres de sa bibliothèque dès les années 1810, on connaît huit autres exemplaires annotés de l’Histoire de la peinture en Italie :- [a] Exemplaire Tourneux, tome I seul connu avant cartons (étudié par P. Arbelet, 1924).- [b] Paris, Bibliothèque Doucet. Exemplaire Blanchard de Farges (id.)- [c] Milano, Biblioteca Braidense. Exemplaire Novati, annoté par l’auteur et par des amis italiens.- [d] Grenoble, Bibliothèque municipale. Exemplaire de Stendhal-Alessandro Carabelli (étudié par H. Martineau in Mercure de France, 1er décembre 1950 ; en reliure d’époque).- [e] Roma, Biblioteca dell’ Instituto di archeologia e storia dell’arte, fonds Rocco Pagliaro (envoi et une annotation).- [f] Torino, Biblioteca dell’Accademia delle Scienze (envoi et une annotation).- [g] Exemplaire Achille Pellizzari, collectionneur stendhalien de l'entre-deux-guerres (vente, mars 1950). Redécouvert et acheté par le stendhalien Dr Bruno Pincherle qui en publie les annotations bien calligraphiées dans le Stendhal Club (n° 3, 15 avril 1959). Le cryptogramme d’auteur du titre est ici complété par M.B.A. Aubertin. Quelques années plus tard, Pincherle signale en passant 3 autres exemplaires d’après une information du grand stendhalien François Michel : "Di tre altre copie ─ non illustrate ancora ─ mi dà notizia François Michel : una di queste appartenne allo storico belga Louis de Potter, grande amico dell’autore [nous soulignons]" (In Compagnia di Stendhal. Milano, Pesce d’oro, 1967, p. 29).- [h] Exemplaire Jacques Guérin, puis Jaime Ortiz Patiño (Sotheby’s, II, 2 décembre 1998, n° 67 ; 14 ff. de garde annotés à l’encre et sur les marges, au crayon ; notes postérieures à la reliure. Certaines ont été publiées par H. Martineau dans Le Calendrier de Stendhal en 1950, pp. 213 et suivantes). Les exemplaires portant le nom complet de Beyle sont rarissimes ; outre celui-ci, on en dénombre six : exemplaire Mérimée (décrit par Vicaire d’après la vente de 1891 et repris par H. Cordier) ; exemplaire Stritch-Jules Guillemin (première mention en 1875) ; exemplaire Georges Heilbrun (relié par Maylander avec les deux titres et le f. de dédicace à l’empereur de Russie) ; exemplaire du comte Kosakowsky (avec envoi ; Sothebys 19 juin 2014, n° 41) et deux exemplaires de la bibliothèque de Stendhal : celui, également annoté, de Jacques Guérin puis de la Bibliothèque Jaime Ortiz Patino, et celui du Colonel Sikles (I, 20-21 avril 1989, n° 196) ayant figuré dans le catalogue Blaizot n° 314 de février 1960 (référence de la main de Simonson au crayon sur la garde du tome I de notre exemplaire). Parmi ces exemplaires, seuls 3 portent des envois (celui de Mérimée, celui du comte Kosakowsky et le présent exemplaire).
Cette Histoire de la peinture en Italie est la première œuvre vraiment originale qu’ait publiée Stendhal, si l’on considère que les Lettres écrites de Vienne en Autriche sur le célèbre compositeur J.H. Haydn (1814, connues sous le titre de Vies de Haydn, Mozart et Métastase qui leur sera donné en 1817) sont davantage des traductions que des compositions (Paupe, p. 18). Nous remercions Hélène de Jacquelot et Jean-Jacques Labia pour leurs précieuses indications concernant les annotations autographes, ainsi que Pascal de Sadeleer, qui présenta cet exemplaire dans nos salles en 2013, et enfin Jacques Houbert.
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